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fonctionnement de la Mastocytose

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Message par Admin Mer 13 Fév - 18:13

source: http://www.therapeutique-dermatologique.org/spip.php?article1213

MASTOCYTOSES
10 février 2012, par GUILLOT B. & KLUGER N.
Sommaire

Mastocytoses
1 - PHYSIOPATHOLOGIE
2 - DIAGNOSTIC
3 - RETENTISSEMENT
4 - PRONOSTIC ET SURVEILLANCE
5 - MOYENS THÉRAPEUTIQUES
6 - INTERFÉRON
7 - INDICATIONS
Tableaux
Liste des références
Les mastocytoses se définissent par un excès de mastocytes intra-tissulaires (Tableau I). Il s’agit d’une maladie rare mais non exceptionnelle qui peut survenir à tout âge, sans prédisposition de sexe. Les manifestations cliniques sont liées, d’une part, à l’accumulation de cellules dans les tissus et, d’autre part, aux effets des médiateurs libérés par les mastocytes. Le pronostic est différent selon l’âge et les organes atteints. Le traitement est mal codifié et repose plus sur l’expérience que sur des études contrôlées de fort niveau de preuve. Les mesures préventives des manifestations congestives doivent cependant toujours être bien connues du malade et de son entourage.

1 - PHYSIOPATHOLOGIE

Le mastocyte (MC) est une cellule présente dans de nombreux organes contenant du tissu conjonctif, comme principalement la peau mais également le foie, les organes lymphoïdes secondaires, le tube digestif et la moelle osseuse. Il produit de nombreux médiateurs (histamine, tryptase, prostaglandines, leucotriènes, cytokines) contenus dans des granulations intracellulaires et participent à diverses réactions physiopathologiques comme l’inflammation, l’immunité antibactérienne et parasitaire, la cicatrisation, l’angiogenèse…

Il est issu d’un progéniteur médullaire CD34+ qui se différencie d’abord en précurseurs mastocytaires via le Stem Cell Factor (SCF), l’interleukine 3IF et l’interleukine 6 puis en mastocytes tissulaires via la SCF et son récepteur membranaire Kit [2, 6]

Kit (ou CD117), issue du proto-oncogène c-Kit localisé sur le chromosome 4 en q11-12, est une protéine membranaire de 145 kDa caractérisée par une partie extracellulaire constituée de domaines « immunoglobulines-like », une partie transmembranaire et une partie intracellulaire contenant le domaine enzymatique tyrosine kinase [31]. Il s’agit d’un récepteur requis pour la croissance, la différentiation et l’activation des mastocytes [2, 6].

Le SCF est primordial dans le développement et l’activation des mastocytes car il entraîne une autophosphorylation du récepteur Kit, qui devient le site d’ancrage de diverses molécules régulatrices et adaptatrices impliquées dans la transduction du signal [31].

Des mutations de c-Kit sont quasiment systématiquement retrouvées dans les mastocytoses systémiques [20]. Ces mutations dites « gain de fonction » aboutissent à l’activation permanente de Kit avec une prolifération incontrôlée et une résistance à l’apoptose des mastocytes. La mutation somatique la plus fréquente, affectant 80 p. 100 des patients avec une mastocytose systémique, est la substitution d’un résidu d’acide aspartique par de la valine au niveau du codon 816 (Asp816Val) [9, 19, 27]. Plusieurs autres mutations ont été identifiées lors des mastocytoses systémiques (Asp820Gly, Val560Gly). Des mutations plus rares de Kit ont été observées sur le domaine juxta-membranaire [3] ou transmembranaire [1]. Enfin, une mutation avec création d’une protéine de fusion FIP1-PDGFRα est retrouvée chez les patients porteurs d’un syndrome hyperéosinophilique associé à la mastocytose [28]. Il est vraisemblable que des lésions géniques secondaires soient nécessaires pour aboutir à un phénotype plus agressif de mastocytose.

2 - DIAGNOSTIC

Le diagnostic de mastocytose, évoqué cliniquement, est confirmé par l’examen histologique. En effet, il existe une grande variété d’aspects cliniques, incluant presque toujours la peau mais pouvant toucher différents organes. L’image histologique est cependant univoque, mettant en évidence l’accumulation de mastocytes par des colorations spéciales.

Parmi les tableaux cliniques les plus souvent rencontrés, il est possible de distinguer les formes cutanées de la maladie, les plus fréquentes, les formes systémiques et les manifestations réactionnelles liées à la dégranulation des mastocytes cutanés ou viscéraux.

2.1 - FORMES CUTANÉES [16]

L’urticaire pigmentaire est la forme la plus fréquente aussi bien chez l’enfant que chez l’adulte. Elle se manifeste par des maculo-papules de petite taille, dont la couleur brun-rouge est très évocatrice. La friction d’une zone atteinte entraîne un œdème érythémateux : c’est le signe de Darier, très évocateur mais inconstant, surtout chez l’adulte.

La telangiectasia macularis eruptiva perstans est une forme rare de mastocytose. Elle survient chez l’adulte sous forme de plaques érythémateuses, parcourues de télangiectasies. Elle siège le plus souvent sur le thorax ou le haut du dos. Le signe de Darier est généralement absent.

Les mastocytomes sont plus fréquents chez le nourrisson et se manifestent par des lésions nodulaires, multiples ou plus souvent uniques. La couleur varie du rose au brun. Une coloration jaune-chamois fait parler de forme xanthélasmoïde. Les poussées congestives, parfois bulleuses après frottement ou après absorption de certains aliments ou médicaments, permet de faire le diagnostic.

Les mastocytoses cutanées diffuses sont très rares et touchent en règle des nourrissons avant l’âge de 6 mois. La peau est épaissie, infiltrée de manière diffuse avec une coloration jaunâtre. Des poussées bulleuses sont fréquentes et sévères. Les mastocytoses cutanées diffuses de l’adulte, exceptionnelles, sont caractérisées par une érythrodermie à peau infiltrée, parfois associée à des nodules.

2.2 - FORMES SYSTÉMIQUES [34]

De très nombreux organes peuvent être atteints par la maladie. Le plus souvent, des signes cutanés sont associés. Il s’agit en particulier des formes à type d’urticaire pigmentaire de l’adulte et des mastocytoses cutanées diffuses de l’adulte ou de l’enfant. Les formes télangiectasiques et les formes nodulaires sont rarement associées à des atteintes viscérales. L’urticaire pigmentaire de l’enfant est le plus souvent isolée.

Les principales localisations viscérales et leur fréquence sont résumées au Tableau II.

2.3 - MANIFESTATIONS RÉACTIONNELLES

Elles sont liées à la libération de médiateurs de l’inflammation par les mastocytes sous l’influence de facteurs externes, le plus souvent médicamenteux ou alimentaires, plus rarement physiques (Tableau III). Il s’agit de signes dermatologiques comme un prurit ou un dermographisme. Des céphalées et des épisodes de flush peuvent être signalés par les malades. Les signes les plus graves sont cardio-vasculaires, à type de tachycardie et d’hypotension pouvant aboutir à un tableau de choc. Les signes digestifs sont fréquents : diarrhée motrice, nausées. Plus rarement peuvent s’observer des bronchospasmes, une dyspnée laryngée ou une rhinorrhée.

2.4 - DIAGNOSTIC PARACLINIQUE

Le diagnostic de mastocytose est histologique et repose sur la mise en évidence d’un infiltrat mastocytaire dans le derme dont la densité est supérieure à 15 par champ à grossissement 40 [35]. La biopsie sera pratiquée sur une zone non préalablement traumatisée afin d’éviter la dégranulation des mastocytes qui rendrait leur reconnaissance plus difficile. De même, l’anesthésie locale devra être dépourvue d’adrénaline. Certains auteurs préconisent une anesthésie au froid. L’image histologique est celle d’un infiltrat de cellules rondes, à cytoplasme souvent éosinophile. Les colorations spéciales permettent de faire le diagnostic. Les granulations spécifiques des mastocytes sont colorées en bleu par le bleu alcian, en violet par le May-Grunwald-Giemsa ou en rouge par la coloration métachromasique au bleu de toluidine. La mise en évidence de marqueurs de surface comme la tryptase, le CD117 (c-Kit) et le CD68 peuvent permettre de révéler des infiltrats minimes mais surtout la présence de cellules après dégranulation.

Parmi les examens complémentaires, lles dosages sanguin et urinaire d’histamine apportent peu d’aide au diagnostic. Des taux urinaires élevés des métabolites de l’histamine (en particulier l’acide N-méthyl-imidazolacétique) seraient sensibles et spécifiques, en rapport avec la prolifération mastocytaire des formes systémiques. Le dosage sérique du taux de tryptase semble l’examen le plus spécifique : exclusivement produit par les mastocytes, son taux est corrélé à la prolifération cellulaire. Les sujets normaux ont un taux inférieur à 5 ng/ml, les patients avec une mastocytose cutanée un taux inférieur à 20 ng/ml et ceux avec une mastocytose systémique un taux supérieur à 20 ng/ml [35]. Par ailleurs, la présence d’un taux supérieur à 75 ng/ml, serait systématiquement associée à la présence de la maladie [15].

Les examens complémentaires semblent peu utiles en dehors de signes cliniques d’appel chez l’enfant. Chez l’adulte, une conférence de consensus (Southampton, États-Unis, 1990) proposait une étude histologique de la peau, un dosage des médiateurs urinaires et une biopsie ostéo-médullaire systématique et, selon les orientations cliniques, une tomodensitométrie osseuse, une exploration digestive et un examen neuro-psychiatrique avec EEG [26].

2.5 - CLASSIFICATION

Compte tenu du polymorphisme de la maladie tant sur le plan clinique que pronostique, de nombreuses classifications ont été proposées, la plus utilisée étant celle de Metcalfe et al, lors de la réunion de consensus de 1990 [26]. Il s’agissait d’une classification en fonction des facteurs pronostiques (Tableau IV). En 1999, Katsambas et al. [16] ont proposé une nouvelle classification en fonction des manifestations cliniques de la maladie (Tableau V). Plus récemment, en 2001, un nouveau consensus a proposé de distinguer les mastocytoses cutanées des mastocytoses systémiques en prenant en compte les aspects cliniques, cytologiques, histologiques et immunochimiques avec l’introduction de critères majeurs et mineurs (dont la présence de la mutation du codon 816 de c-kit) (Tableau VI) [35].

3 - RETENTISSEMENT

Chez l’enfant, le retentissement de cette maladie est le plus souvent limité en l’absence de manifestations congestives [22].

Chez l’adulte, si la plupart des mastocytoses sont bénignes, le retentissement de la maladie n’en est pas moins important : les lésions sont souvent considérées comme affichantes, les poussées congestives peuvent entraîner une gêne dans la vie quotidienne et ont des caractères anxiogènes marqués, tous éléments qui viennent perturber la qualité de vie des malades. Dans les formes agressives ou malignes, le retentissement est en rapport avec la sévérité du pronostic.

4 - PRONOSTIC ET SURVEILLANCE

Le pronostic des mastocytoses est difficile à apprécier lors du diagnostic initial. Néanmoins, certains aspects cliniques sont plus souvent associés à une évolution bénigne alors que d’autres peuvent faire craindre une évolution plus agressive.

Chez l’enfant, l’urticaire pigmentaire est en règle de bon pronostic et disparaît à la puberté plus d’une fois sur deux. Les mastocytomes sont également de bon pronostic et disparaissent spontanément en quelques années. Les mastocytoses cutanées diffuses de l’enfant sont de pronostic plus réservé : l’importance des réactions par libération de médiateurs, la sévérité des poussées bulleuses et des décollements qui s’ensuivent peuvent nécessiter une prise en charge attentive. De plus, ces formes peuvent s’associer à des localisations systémiques. Exceptionnellement, elles peuvent également persister à l’âge adulte. En dehors de cette forme et en l’absence de point d’appel clinique, il n’y a pas d’indication à la réalisation d’examens paracliniques systématiques.

Chez l’adulte, la régression spontanée des mastocytoses est rare. Si la forme télangiectasique est rarement associée à des localisations systémiques, l’urticaire pigmentaire nécessite un examen clinique et un interrogatoire attentif à la recherche de signes viscéraux ou réactionnels, qui justifieront alors des examens complémentaires orientés. Dans les formes de mastocytoses cutanées diffuses de l’adulte, les atteintes systémiques sont quasi constantes. Trois tableaux cliniques sévères méritent d’être individualisés :

- les mastocytosesassociées aux hémopathies (5 à 30 p. 100 des cas) : les syndromes myéloprolifératifs ou myélodysplasiques, les lymphomes et les leucémies aiguës sont plus fréquents que dans la population générale. C’est l’hémopathie qui conditionne alors le pronostic ;

- les mastocytoses agressives (5 à 15 p. 100 des cas) : Les signes cutanés sont souvent absents, même s’il est parfois possible de retrouver en histologie une hyperplasie mastocytaire. Le tableau clinique est caractérisé par un syndrome tumoral, une infiltration hépato-splénique, une malabsorption digestive, une ostéolyse. Sur le plan biologique, peuvent être trouvées une cytopénie, une thrombocytose, une éosinophilie sanguine. La moelle est constamment envahie et le pronostic est sévère avec un envahissement progressif de tous les viscères. Une forme ganglionnaire avec hyperéosinophilie a été décrite [6] ;

- la leucémie à mastocyte : exceptionnelle (1 à 2 p. 100 des cas), c’est la forme maligne de mastocytose. Les signes d’atteinte viscérale, une mastocytose sanguine supérieure à 10 p. 100, les complications par poussées congestives itératives et l’envahissement médullaire aboutissent au décès en quelques mois.

Un certains nombre de facteurs pronostiques ont été dégagés par Travis et al. [34]. Ainsi sont considérés comme facteurs de mauvais pronostic :

- cliniques : l’âge avancé, le sexe masculin, la présence de signes généraux, l’absence de lésion cutané ou osseuse, l’hépato-splénomégalie et l’association à une hémopathie ;

- biologiques : une anémie, une thrombopénie et une perturbation des tests hépatiques ;

- histologiques : des noyaux mastocytaires lobulés, une raréfaction des adipocytes dans la moelle osseuse.

On estime que la survie à 5 ans lors d’une mastocytose systémique s’élève à 61% en l’absence d’hémopathie. Dans le cas contraire, la survie chute à 28 p. 100 [6]

Aucun consensus ne peut être proposé pour la surveillance d’une mastocytose. Chez l’enfant, une surveillance clinique pour rappeler les conseils d’éviction semble suffisante. Chez l’adulte, le rythme de surveillance est fonction du tableau clinique et pronostique de la maladie. Dans les formes cutanées pures, une surveillance clinique et une formule sanguine une à deux fois par an peuvent être proposées. Dans les formes sévères, le rythme de surveillance peut être rapproché et les examens paracliniques effectués selon les points d’appel et les signes cliniques.

5 - MOYENS THÉRAPEUTIQUES

Actuellement, aucune thérapeutique n’a d’AMM avec l’indication « mastocytose ». Il n’existe pas d’études à haut niveau de preuve dans cette maladie rare et nous ne disposons que de très peu d’études contrôlées. Les médicaments proposés peuvent avoir deux buts : réduire les manifestations congestives de la maladie ou chercher à diminuer l’infiltration mastocytaire [16, 25].

5.1 - PRÉVENTION DES SYMPTÔMES RÉACTIONNELS

Les poussées réactionnelles se révèlent par des manifestations congestives sous la dépendance de la libération des médiateurs contenus dans le mastocyte. Le premier élément de prise en charge d’une mastocytose réside donc dans la prévention de ces manifestations.

Un certain nombre de facteurs physiques ou chimiques sont responsable d’une dégranulation non spécifique des mastocytes, induisant les symptômes des poussées congestives (Tableau VII).

Il s’agit de facteurs physiques :

- frottement intempestif, notamment lors de la toilette des nourrissons ou des enfants ;

- brûlures ou traumatismes locaux ;

- piqûres d’hyménoptères qui peuvent induire des réactions anaphylactoïdes particulièrement sévères et en imposer pour une allergie immédiate au venin. Cependant, la désensibilisation serait inefficace et dangereuse ; elle n’a donc dans cette situation, aucune indication.

Parmi les facteurs alimentaires, les aliments histaminolibérateurs sont à éviter.

Les facteurs médicamenteux doivent être connus car ils sont le plus souvent en cause :

- les anesthésiques sont souvent à l’origine de poussées sévères et toute intervention chez un malade atteint de mastocytose doit donner lieu à des précautions particulières : l’anesthésiste doit en être informé, les curares et les opiacés seront évités, et la prémédication à base d’antihistaminique doit être renforcée. La même attitude doit être préconisée lors de l’injection de produit de contraste iodé ;

- les autres médicaments sont indiqués au tableau VII. L’utilisation de bêta-bloquants est contre-indiquée chez les malades atteints de mastocytose car ils peuvent diminuer l’efficacité d’un traitement par épinéphrine utilisé en cas d’urgence.

Les conseils d’éviction et les précautions que l’on peut proposer aux malades sont résumés au Tableau VII.

5.2 - ANTIHISTAMINIQUES

Les anti-histaminiques bloquent les récepteurs H1 ou H2 de l’histamine. Ils sont depuis longtemps utilisés dans le traitement des mastocytoses et ont un rôle symptomatique pour diminuer le prurit ou certaines manifestations congestives de la maladie. Ils ne modifient pas la prolifération cellulaire.

Aucune étude ne permet à ce jour de privilégier une molécule anti-H1 plus qu’une autre dans le traitement symptomatique des mastocytoses [16]. En revanche, une étude contrôlée réalisée chez des malades avec une urticaire pigmentaire et une maladie systémique montre que l’association anti-H1 et anti-H2 peut améliorer significativement le prurit et les poussées œdémateuses de la même manière que le cromoglycate disodique (étude randomisée sur une série de faible effectif, niveau de preuve C) [8]. Les anti-H2 peuvent également être efficaces sur les signes digestifs de la maladie comme les douleurs abdominales ou les diarrhées.

5.3 - ANTIDÉGRANULANTS

Deux molécules sont proposées :

- le cromoglycate disodique réduirait le prurit et les poussées d’œdème de l’urticaire pigmentaire. Les résultats des études contrôlées sont cependant discordants. Il est plus efficace que le placebo pour limiter les symptômes gastro-intestinaux comme la diarrhée, les douleurs abdominales, les vomissements et les nausées (étude en double aveugle contre placebo sur une série de faible effectif, niveau de preuve C). Il serait cependant aussi efficace que l’association anti-H1 et anti-H2 pour certains auteurs [8], mais moins efficace pour d’autres [12] ;

- le kétotifène agit par une action anti-H1 et un effet stabilisant des membranes plasmiques. Dans une étude contrôlée contre l’hydroxyzine réalisée chez l’enfant, il ne s’est pas montré supérieur pour la diminution des symptômes congestifs (niveau de preuve C) [17]. Il est, en revanche, plus efficace que le cromoglycate disodique.

5.4 - CORTICOTHÉRAPIE

Elle peut être utilisée par voie locale, intralésionnelle ou systémique. Son but est de réduire le nombre de mastocytes présents dans la peau. Toutes les études proposées sont cependant des études de faible niveau de preuve : cas cliniques ou courtes séries ouvertes.

La corticothérapie locale [12] consiste en l’application sous occlusion de dermocorticoïdes de classe I ou II, sur des zones successives du corps pour éviter une absorption systémique trop importante. Ils permettent de réduire le nombre de lésions d’urticaire pigmentaire dans la plupart des études, avec des durées de rémission de plusieurs mois sans effets secondaires notables. L’atrophie cutanée est réversible en 6 semaines environ.

Des résultats similaires sont obtenus avec des injections intralésionnelles de corticoïdes.

La corticothérapie par voie orale aurait un intérêt dans les formes digestives sévères de la maladie et améliorerait un syndrome de malabsorption ou une ascite [25].

5.5 - PUVATHÉRAPIE

La PUVAthérapie a un double mode d’action : elle diminue le nombre des mastocytes dans le derme et la synthèse des médiateurs. Elle a été utilisée chez des adultes et des enfants atteints d’urticaire pigmentaire dans des études ouvertes portant sur des cas isolés ou de courtes séries de faible niveau de preuve. Dans ces études, la PUVAthérapie permettait de diminuer le prurit et le signe de Darier et de diminuer le nombre de macules pigmentées [16]. Les protocoles de PUVAthérapie utilisés sont identiques à ceux proposés dans les autres indications dermatologiques : prise de 8-MOP à la dose de 0,5 mg/kg deux heures avant l’irradiation. La dose d’UVA initiale est fonction du phototype (entre 0,5 et 1 J/cm2). Les malades reçoivent l’irradiation trois fois par semaine. La durée du traitement varie de 2 à 7 mois. L’utilisation d’UVA longs (UVA1) serait plus efficace que la PUVAthérapie classique [16].

6 - INTERFÉRON [4, 32]

L’association entre mastocytose et syndrome myéloprolifératif et l’efficacité de l’interféron a dans la leucémie myéloïde chronique ont donné lieu à de très nombreuses publications, discutant de son intérêt dans le traitement des mastocytoses. Il s’agit cependant toujours d’études de niveau de preuve faible (cas cliniques ou courtes séries). De plus, l’analyse rétrospective de près de 30 cas de la littérature donne des résultats contradictoires [32].

Le mécanisme précis d’action de l’interféron α n’est pas connu. Il agirait en inhibant la sécrétion spontanée ou induite d’histamine et en régulant de manière négative les cytokines qui contrôlent l’activation mastocytaire. Les résultats sont également discordants pour les signes cutanés ou osseux. Il peut être utilisé en association à la corticothérapie générale.

6.1 - 2-CHLORODEOXYADENOSINE (CLADRIBINE®)

La 2-Chlorodeoxyadenosine (2-CdA, Cladribine®) est un analogue nucléosidique purinique qui a été utilisé avec efficacité chez plusieurs patients n’ayant plus d’autre ressource thérapeutique lors de mastocytoses systémiques [23]. Lortholary et al ont observé une réponse majeure dans 24 cas sur 33 dans un délai de 4 mois avec une efficacité sur 16 mois pour diverses manifestations (signes cutanés, atteinte osseuse, volume tumoral, signes fonctionnels) [21]. L’efficacité porte donc sur les manifestations cutanées, les signes systémiques et la prolifération mastocytaire. L’indication de la 2-CdA reste limitée aujourd’hui aux formes agressives. Dans une cohorte française de 44 malades atteints de mastocytoses résistantes aux traitements classique, à l’interféron ou aux inhibiteurs de kinases, la cladribine à la dose de0,15mg/kg sur 5 jours chaque mois montre (4 cycles en moyenne) une réponse objective a été observée chez 29 des 44 malades [13].

6.2 - INHIBITEURS DE TYROSINE-KINASE SPECIFIQUES DE C-KIT

Le principal inconvénient des thérapeutiques précédentes (interféron, 2-CdA) est leur absence de spécificité. Les nouvelles thérapeutiques ciblent actuellement la prolifération mastocytaire anormale par un blocage de l’activité tyrosine-kinase. Plusieurs inhibiteurs sont en cours d’étude dans des essais cliniques ou en cours de développement [31].

L’imatinib mésylate (Glivec®) est un puissant inhibiteur de tyrosine kinase qui a fait preuve de son efficacité dans la leucémie myéloïde chronique ou les tumeurs gastriques stromales, où des mutations activatrices de c-kit sont à l’origine du processus néoplasique. Il a également montré son efficacité in vitro sur des lignées mastocytaires anormales sans mutation de c-Kit ou avec certaines mutations (V560G). En revanche, l’imatinib n’a aucune efficacité en cas de mutation D816V. L’imatinib est tout particulièrement efficace dans les mastocytoses avec hyperéosinophilie associées au transcript de fusion FIP1L1-PDGFRα entraînant une activation constitutive de la kinase PDGFRα [26]. Ainsi, la recherche de cette mutation est recommandée chez tous les patients ayant une mastocytose systémique avec hyperéosinophilie [31]. Dans une étude de phase II incluant 14 patients avec une mastocytose systémique, l’imatinib a été donné à la dose de 400 mg/j pendant 3 à 6 mois avec une faible corticothérapie orale les 15 premiers jours (en prévention des anecdotiques cas de chocs cardiogéniques) [5]. Sur les 14 patients, 11 étaient porteurs de la mutation du codon 816 et 1 de la mutation FIPL1-PDGFRα. Chez 10 patients, le taux de tryptase a chuté de 20 p. 100. Une diminution de l’infiltration médullaire et des manifestations systémiques a été notée chez 8/13 patients. De plus, une amélioration des lésions cutanées de 5/9 patients a été observée. Une réponse complète était observée chez le patient porteur du transcrit de fusion PDGFRα. Le traitement était globalement bien toléré sans doute en raison de la corticothérapie introduite en début de traitement [5]. Néanmoins, les auteurs de l’étude montraient clairement un lien entre les variations du taux sérique de tryptase et l’introduction ou l’arrêt de l’imatinib.

Le masitinib, inhibiteur de c-Kit et de Lyn a été utilisé dans une étude de phase IIa pluricentrique chez 25 malades atteints de mastocytoses avec symptômes invalidants mais ne portant pas la mutation D816V de c-Kit. Le masitinib était utilisé à la dose de 3 ou 6 mg/kg/j pendant 12 semaines. Globalement, 14 des 25 malades ont présenté une réponse objective. Les principaux effets secondaires étaient un œdème, des crampes et des nausées [30]

6.3 - PERSPECTIVES : AUTRES VOIES THÉRAPEUTIQUES

D’autres cibles thérapeutiques sont actuellement en cours d’évaluation comme des inhibiteurs de la voie de signalisation de Kit autres que la tyrosine kinase.

Ainsi, la geldanamycine est un antibiotique se liant à la protéine de choc thermique 90 (hsp90) ce qui favorise la dégradation de kinases pro-oncongène dépendantes d’hsp 90.

La voie NF-kB est impliquée dans la progression du cycle cellulaire des mastocytes anormaux. Le bortezomib (Velcade®) est actuellement utilisé dans un essai clinique [31].

La voie mTOR (serine/threonine kinase mamalian Target Of Rapamycin), impliquée dans la croissance et la progression dans le cycle cellulaire des mastocytes est activée également par Kit. Gabillot-Carre et al ont montré un effet biologique, différent de l’imatinib, avec une efficacité de la rapamycine sur une lignée de mastocytes avec la mutation 816 [10].

Divers anticorps monoclonaux anti-récepteur de l’interleukine 2 (basiliximab, daclizumab), anti-CD33 (gemtuzumab ozogamicin), anti-CD87 et CD45, ainsi que le denileukin diftitox (Ontak®), une protéine de fusion entre l’IL-2 et la toxine diphtérique, pourraient être des traitements potentiels, nécessitant des études préliminaires [31].

D’autres molécules sont actuellement en cours d’investigation. C’est le cas du dasatinib, in inhibiteur de kinase actifs sur les formes c-Kit mutées y compris en D816V [36]. La midostaurin enfin active sur les formes mutées de c-Kit montre des taux de réponses objectives de l’ordre de 38% dans des études de phase II [11].

6.4 - AUTRES TRAITEMENTS

L’acide salicylique est réputé pour faciliter la dégranulation des mastocytes. Cependant, dans certaines études, il permettrait de diminuer les poussées hypotensives au cours de la maladie par son activité antiprostaglandine. Il doit cependant être utilisé très prudemment, à petite dose et toujours sous couvert d’une association anti-H1 et anti-H2.

L’épinéphrine est proposée pour le traitement des épisodes anaphylactiques. Son efficacité peut être diminuée chez des malades sous bêta-bloquants. Les malades atteints de formes sévères ou systémiques doivent être en possession d’une trousse d’urgence pour pouvoir agir le plus rapidement possible en cas de réaction de type anaphylactique, après piqûre d’hyménoptère notamment.

La nifédipine à la dose de 10 mg trois fois par jour a été jugée efficace sur les flushs et les poussées urticariennes dans un cas isolé [7].

Les biphosphonates associés à la vitamine D et au calcium ont été utilisés dans les atteintes osseuses à type d’ostéoporose diffuse mais leur efficacité est discutée [24].

Les cytostatiques sont utilisés dans les atteintes hématologiques. Dans les formes osseuses ostéocondensantes, le chlorambucil a été proposé.

La ciclosporine A, associée à la corticothérapie générale, s’est montrée efficace dans un cas isolé de mastocytose agressive [18]. Il n’y a cependant pas de preuve de l’efficacité de la ciclosporine dans cette indication [24].

Les techniques chirurgicales sont utilisées dans les formes nodulaires isolées. Le laser à colorant pulsé a été proposé dans des formes télangiectasiques. L’utilisation de méthodes invasives dans les mastocytoses doit être soumise à une préparation stricte, notamment en ce qui concerne l’anesthésie (voir ci-dessus).

7 - INDICATIONS [16, 25, 29]

7.1 - MANIFESTATIONS CONGESTIVES

Elles doivent être systématiquement prévenues, quel que soit l’aspect clinique de la maladie et l’âge du malade, par :

- le respect de l’éviction des aliments ou des médicaments en cause et le renforcement des mesures préventives en cas d’anesthésie ;

- la prescription d’un antihistaminique anti-H1 isolé ou associé à un anti-H2 selon l’importance des signes, voire un antidégranulant.

La survenue d’un choc anaphylactique repose sur l’injection d’épinéphrine en urgence.

7.2 - MASTOCYTOSES CUTANÉES ISOLÉES

Chez l’enfant, en dehors de la prévention des manifestations congestives, l’abstention peut être proposée dans les urticaires pigmentaires en attendant la disparition des signes et en rassurant les parents. Dans les formes bulleuses, les mesures de prévention seront particulièrement strictes en raison de la gravité potentielle des manifestations congestives. Devant un mastocytome solitaire, l’exérèse chirurgicale est proposée en cas de gêne fonctionnelle.

Chez l’adulte, en cas de gêne importante liée à l’urticaire pigmentaire, les dermocorticoïdes sous occlusion peuvent être proposés, ou une PUVAthérapie.

7.3 - MASTOCYTOSES VISCÉRALES ET MASTOCYTOSES AGRESSIVES

Les atteintes osseuses peuvent bénéficier des biphosphonates, éventuellement associés à l’interféron. Le chlorambucil a été proposé dans les formes évolutives sévères.

Les atteintes digestives justifient la prescription d’une association d’antihistaminiques anti-H1 et anti-H2. L’utilisation d’inhibiteurs de la pompe à proton peut également diminuer les sécrétions acides gastriques. La place de l’interféron a est encore mal définie. La corticothérapie générale est à proposer en cas de syndrome de malabsorption ou d’ascite.

Les atteintes hématologiques de forme maligne sont traitées par chimiothérapie selon des protocoles propres aux leucémies non lymphocytaires. Dans les leucémies à mastocytes, les résultats sont cependant décevants [30]. L’intérêt de l’interféron dans les hémopathies associées aux mastocytoses reste controversé. Dans les cytopénies associées à une splénomégalie, l’indication d’une splénectomie peut être posée, en tenant compte de la préparation spécifique à la splénectomie et aux contraintes de l’anesthésie chez un malade atteint de mastocytose. Elle peut entraîner une amélioration de la cytopénie, même si le résultat à long terme est encore mal connu [34].

MASTOCYTOSES AGRESSIVES

Hormis les traitements symptomatiques, la prise en charge des mastocytoses agressives dépend de la présence ou non d’une hyperéosinophilie. En cas d’hyperéosinophilie, la recherche de la mutation PDGFRa est indispensable. Si elle est présente, l’imatinib sera proposé en première intention. Si elle est absente, on choisira l’interféron en association avec la prednisone ou avec l’aracytine. En l’absence d’hyperéosinophilie, c’est la recherche de la mutation Asp816Val qui est indispensable. Dans le cas d’une mutation, l’imatinib ne peut pour le moment être proposé en première intention. Le praticien aura le choix entre l’interféron avec une corticothérapie systémique ou avec l’aracytine, puis la cladribine en 2ème ligne. La cladribine peut également être proposé en 1ère intention [33] dans certaines formes agressives. La place du masitinib dans les formes non mutée en D816V mérite d’être mieux précisé.

Des recommandations ont été émises par la société américaine d’hématologie et qui sont résumées au Tableau VIII [29].

Tableau I
Physiopathologie des mastocytoses [16].
• Les mastocytoses sont liées à l’accumulation de mastocytes dans la peau et les tissus.
• Les manifestations de la maladie dépendent de deux facteurs :
- l’accumulation de cellules normales dans les tissus ;
- la libération des médiateurs intramastocytaires qui provoquent une vasodilatation (histamine) et une inflammation (médiateurs lipidiques, cytokines), responsables des poussées congestives.
• Le mastocyte est une cellule issue de la moelle osseuse qui migre dans les tissus où il peut proliférer sous l’influence de facteurs de croissance et de cytokines.
• Les facteurs de croissance les plus important des mastocytes sont les interleukine 3 et 6 et le facteur de croissance mastocytaire ou kit-ligand. Il est produit par les fibroblastes. Son récepteur est la protéine kit, produit du proto-oncogène c-kit. Ce récepteur est une tyrosine kinase présente à la surface des mastocytes. Des anomalies quantitatives ou qualitatives du ligand ou du récepteur pourraient être à l’origine de l’hyperprolifération mastocytaire. Des mutations de c-kit ont été mises en évidence dans certaines formes de mastocytoses.
• Le mastocyte intervient dans de nombreuses réactions inflammatoires, en particulier au cours des réactions allergiques. Il joue un rôle dans la cicatrisation et la formation de la fibrose tissulaire. Son activité est médiée par la libération de très nombreux médiateurs.
• Les médiateurs libérés par les mastocytes sont :
1) des médiateurs libérés à partir de granules préformés dans le mastocyte :
- histamine,
- protéoglycanes (héparine et chondroïtine sulfate) ;
- enzymes : sérine protéases (tryptase, chymase, cathepsine G, carboxypeptidases...) et hydrolases acides (ß-hexosaminidases, ß-glucuronidases, arylsulfatases...) ;
2) des médiateurs lipidiques de l’inflammation :
- leucotriènes B4, C4 et D ;
- platelet activating factor ;
- prostaglandines D2 ;
3) des cytokines :
- TNF-α ;
- interleukines 1, 3, 4, 5, 6, 8.
• Les mastocytoses sont considérées actuellement plutôt comme un désordre clonal de cellules souches
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